LA TAPISSERIE AU XIV° SIÈCLE                        45
il le parti de faire couper en trois morceaux la tapisserie de la Bataille de Roosebecke. Plus tard, on divisa en deux chacune de ces trois parties, jugées encore trop lourdes. C'est sous cette forme qu'elle paraît, en 1536, dans l'inventaire dressé sous Charles-Quint, dernière mention.où son existence soit signalée. Elle se trouvait alors dans un état lamentable, « fort vieille et trouée, » dit l'inventaire. Les travaux de Michel Bernard pour le duc de Bourgogne ne se bornent pas à la tapisserie représentant un des faits d'armes dont la noblesse française se montrait particulièrement fière. En 138G, il avait livré une Histoire de Fierabras d'Alexandre, longue de vingt et une aunes, haute de cinq ; une Histoire d'Octavien de Rome, ,ou de l'empereur Auguste, destinée à étre offerte en présent au duc d'York, oncle de Richard II d'Angleterre, en même temps que l'Histoire de Perceval le Gallois, vendue par André de Monchi; une Histoire du roi Clovis, de trente-deux aunes sur six et demie de haut, offerte au duc de Lancastre; une Histoire de Notre-Dame, destinée au duc de Glocester, chargé avec le duc de Lancastre de négocier la trêve avec la France; enfin une Chasse de Gui de Ro-ménie, de vingt-huit aunes de cours sur six et demie. Dom Plan­cher, dans son Histoire de Bourgogne, cite cinq autres tapisseries données à des seigneurs anglais pour les disposer à un accommode­ment. Ces licites présents contribuaient à étendre au loin la répu­tation des métiers d'Arras et leur procuraient ainsi de nouveaux débouchés.
L'énumération des nombreuses tapisseries sorties des ateliers de Paris et d'Arras pendant un quart de siècle vient de donner une idée de la prodigieuse rapidité d'exécution de nos anciens artisans. N'y a-t-il pas lieu de s'étonner, aujourd'hui que la production est bien lente, qu'un pareil nombre de tentures ait été terminé dans un aussi court espace de temps? Comment se fait-il qu'il reste aujour­d'hui si peu de ces somptueuses décorations, si nombreuses dès la fin du xivc siècle?
Les comptes eux-mêmes vont se charger de nous expliquer la rareté actuelle de ces antiques témoignages de l'industrie nationale.
Les fréquents déplacements de la cour royale et des seigneurs, l'habitude d'emporter dans les voyages toutes les garnitures de chambre, et "aussi l'incurie, des officiers chargés de la surveillance des meubles, eurent pour résultat la destruction rapide des tapis-